Aux États-Unis, l’endettement est devenu un élément incontournable de la vie de millions de personnes. En 2024, les consommateurs américains devront rembourser un montant stupéfiant de 1 000 milliards de dollars en cartes de crédit seules, avec un solde moyen des ménages dépassant 7.000 dollars. La dette des prêts étudiants a dépassé les 1.700 milliards de dollars, affectant plus de 43 millions d’emprunteurs. Les prêts hypothécaires, d’automobiles et les prêts personnels ajoutent des centaines de milliards au fardeau de la dette nationale. La plupart de ces dettes ont un point commun : les intérêts. L’intérêt, c’est-à-dire le coût de l’emprunt, est tellement ancré dans notre système financier que beaucoup le considèrent comme une réalité inévitable. Pourtant, l’islam remet en question cette hypothèse et adopte une position ferme contre les intérêts sous toutes leurs formes.
Le Concept de Riba dans le Droit Islamique
Pour comprendre pourquoi l’islam interdit les intérêts, nous devons d’abord nous pencher sur le concept de « riba » dans la loi islamique. Le riba, souvent traduit par « usure » ou « intérêt », est considéré comme un péché majeur dans l’Islam. Le Coran, le livre saint de l’Islam, contient plusieurs versets condamnant le riba en termes très forts. L’un de ces versets est le suivant : « Ô vous Croyants, ne consommez pas le riba (en facteurs multiples), et soyez conscient de Allah, si vous désirez réussir. » (Coran 3:130). L’interdiction du riba dans l’Islam découle de plusieurs principes fondamentaux. Le premier et le plus important est le concept de justice sociale et économique. L’islam considère le prélèvement des intérêts comme une pratique d’exploitation qui creuse le fossé entre les riches et les pauvres. Lorsqu’un prêteur perçoit des intérêts, il est assuré d’obtenir un rendement, quelle que soit la situation de l’emprunteur ou le résultat de son projet. Ce transfert de risque du prêteur à l’emprunteur est considéré comme injuste, en particulier lorsqu’il conduit à un cycle d’endettement qui peut piéger les individus et les familles dans des difficultés financières. En outre, l’économie islamique souligne l’importance du partage des risques dans les transactions financières. Le système économique islamique idéal encourage les partenariats où les deux parties partagent les profits et les pertes dans toute entreprise. Cette approche est censée favoriser une répartition plus équitable des richesses et promouvoir la stabilité économique. Le prêt avec intérêt, en revanche, est considéré comme un moyen de dissocier l’argent d’un coté, de l’activité économique réelle de l’autre et d’encourager les comportements spéculatifs.
Principes à la base de l’interdiction des intérêts
Un autre argument clé contre l’intérêt dans la pensée islamique est qu’il représente « l’argent qui engendre l’argent ». Dans l’économie islamique, l’argent est considéré comme un moyen d’échange et non comme une marchandise en soi. L’idée selon laquelle l’argent devrait augmenter en valeur simplement parce qu’il est prêté est considérée comme contre nature et nuisible à l’économie. Au contraire, l’Islam encourage l’investissement des capitaux dans des entreprises productives qui créent de la valeur et contribuent au bien-être de la société. L’interdiction des intérêts est également liée au concept islamique que la richesse est en fait un dépôt de Dieu. Selon cette conception, toutes les richesses appartiennent en fin de compte à Dieu et les humains n’en sont que des intendants, chargés de les gérer. Le prélèvement d’intérêts est considéré comme un abus de confiance, car il permet aux riches d’accroître leurs richesses sans effort ni risque, souvent aux dépens de ceux dans le besoin. Les détracteurs de la finance islamique pourraient faire valoir que sans les intérêts, rien n’inciterait les gens à prêter de l’argent ou aux épargnants à épargner. Cependant, la finance islamique a développé des modèles alternatifs qui visent à atteindre des fonctions économiques similaires sans recourir à l’usure. Il s’agit notamment d’accords de partage des bénéfices (mudarabah), de partenariats (musharakah) et de financement à prix coûtant majoré (murabaha), dont les détails dépassent le cadre de cet article. Les banques islamiques proposent également des comptes d’épargne dont le rendement est basé sur les bénéfices de la banque plutôt que sur un taux d’intérêt prédéterminé. Il convient de noter que l’interdiction islamique des l’intérêts s’étend au-delà des prêts personnels pour englober toutes formes de transactions basées sur l’intérêt, y compris les obligations d’État et les dettes d’entreprise. Cette approche globale reflète la conviction que les effets néfastes de l’usure s’étendent à tous les niveaux de l’économie.
Défis et implications dans le monde moderne
La position islamique sur l’intérêt a attiré l’attention au-delà du monde musulman ces dernières années, en particulier à la suite des crises financières qui ont mis en évidence les instabilités du système financier mondial. Certains économistes, Musulmans et non-Musulmans, ont affirmé que le prêt avec intérêt avait contribué à ces crises en encourageant l’endettement excessif et les comportements spéculatifs. Cependant, la mise en œuvre d’une économie sans intérêts dans le monde moderne présenterait des défis considérables. Le système financier mondial est profondément imbriqué dans les instruments basés sur les intérêts, et nombreux sont ceux qui affirment que l’abandon total des intérêts serait impraticable, voire nuisible à la croissance économique. Néanmoins, la croissance de la finance islamique au cours des dernières décennies démontre que des modèles alternatifs sont possibles et peuvent coexister avec la finance conventionnelle. Pour de nombreux Musulmans, éviter les intérêts n’est pas seulement une décision économique, mais une question de foi et d’éthique. Cela peut poser des problèmes pour naviguer dans le paysage financier moderne, en particulier dans les pays à majorité non musulmane où les options d’empunt sans intérêt peuvent être limitées. Certains musulmans choisissent d’éviter complètement de s’endetter, tandis que d’autres recherchent des produits financiers islamiques ou font appel à des cercles de prêt sans intérêt au sein de leur communauté. L’interdiction islamique des intérêts soulève également des questions plus larges sur la nature de l’argent et de la finance dans notre société. Elle nous pousse à nous demander si notre système financier actuel répond réellement aux besoins de tous les membres de la société ou s’il perpétue au contraire l’inégalité et l’instabilité. Bien qu’une refonte complète du système financier mondial soit peu probable, les principes qui sous-tendent la position islamique sur l’intérêt peuvent offrir des indications précieuses pour réformer et améliorer nos pratiques économiques. En fin de compte, l’interdiction islamique des intérêts est enracinée dans les principes de justice sociale, de partage des risques et de la nature de l’argent et de la richesse. Bien qu’elle contraste fortement avec le système basé sur l’intérêt qui domine la finance mondiale aujourd’hui, elle offre une perspective alternative sur les relations économiques qui donne la priorité à l’équité et au bien-être social. Alors que les Américains sont aux prises avec le fardeau de la dette et des intérêts, l’approche islamique de la finance offre matière à réflexion sur la manière dont nous pourrions créer un système économique plus juste et plus stable pour tous.
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